Deux documentaires actuellement disponibles sur Arte pour encore quelques jours seulement permettent d’apprécier l’alimentation de Néandertal et de l’Homo sapiens durant la Préhistoire. Le premier documentaire s’intéresse au Paléolithique, période où les humains sont chasseurs-cueilleurs et nomades, tandis que le second s’intéresse au Néolithique (à partir de -10 000) lorsque les humains sont sédentaires, agriculteurs et éleveurs. Au-delà de la description de la chasse et des aliments consommés, les documentaires reviennent sur les conséquences sur notre corps de cette alimentation qui a changé considérablement entre les deux périodes.

Néandertal et Sapiens sont omnivores
Le premier documentaire s’intéresse à l’alimentation de l’homme de Néandertal et de l’Homo Sapiens à la période du Paléolithique. L’abri du Maras en Ardèche occupé par Néandertal, la grotte de Figueira Brava (Portugal) sont des lieux mis en avant. Le documentaire revient notamment sur une idée reçue : bien que l’homme de Néandertal fût un grand mangeur de viande, son alimentation ne s’y limitait pas. Au contraire, les études des dents fossilisés et des camps principaux de ces humains ont montré que leur régime alimentaire était omnivore. Au-delà du grand et petit gibier qu’ils pouvaient chasser, ces humains pêchaient, récoltaient des coquillages et des crustacés, mangeaient des végétaux, des céréales, qu’ils faisaient parfois cuire.
L’importance du feu dans l’alimentation
L’étude des camps de ces humains permet aussi de déceler quelles sont les espèces chassées, sachant que le renne était l’un des proies principales. On y apprend que l’humain est également opportuniste, s’attaquant à des animaux piégés, et parfois charognard aussi. À travers l’expérimentation, on nous apprend l’importance du feu dans l’alimentation de ces humains. Plus qu’un outil qui sert à se réchauffer et à se protéger, le feu permet de faire cuire la viande. De fait, elle est plus facile à mastiquer : l’humain perd moins d’énergie à manger. Surtout, le feu permet à la viande d’être plus nutritionnelle : elle est plus facile à mastiquer et devient une véritable bouille dans la bouche et dans l’estomac. Lorsque les morceaux de viande sont dans l’estomac, une superficie plus grande de cette viande sera au contact des enzymes qui la digéreront pour nourrir le corps. Lorsque la viande est crue, et donc moins en bouillie, seule une petite partie de cette viande sera au contact des enzymes. Par ailleurs, c’est cette viande cuite qui a permis de faire grossir notre cerveau, et très probablement de multiplier nos neurones.
Les humains savaient déjà réaliser du pain avant le néolithique
Enfin, les humains utilisaient des outils pour leur alimentation. Au-delà des silex ou des os pour casser, déchiqueter, couper la viande, on a retrouvé des pierres pour moudre les céréales. Vraisemblablement les humains, notamment les Natoufiens au Proche-Orient, dernière population de chasseurs-cueilleurs, savaient déjà réaliser des galettes de pains avant même la domestication des céréales.
Le mode de vie néolithique : définition et diffusion
Le deuxième documentaire s’interroge sur les conséquences anatomiques, environnementales, médicales et sociales de la néolithisation des sociétés du Proche-Orient à l’Europe. Le site de Çatal Höyük en Anatolie centrale (actuelle Turquie) est très mis en avant. Après une définition de la « révolution néolithique » (parlons plutôt de processus) en une domestication des végétaux, des animaux, de la sédentarisation et de l’invention de la céramique est étudiée sa diffusion. Le débat d’une acculturation des sociétés au mode de vie néolithique ou d’un « remplacement » des populations chasseurs-cueilleurs par des populations au mode de vie néolithique en appelle aux études ADN. Celles-ci démontrent que la diffusion du mode de vie néolithique s’est faite par le remplacement des chasseurs-cueilleurs par les fermiers.

Comment la peau blanche est-elle née ?
Les études sur l’ADN en laboratoire, les études sur les os, ainsi que sur les dents permettent de comprendre quelle est la nouvelle alimentation des humains lors du néolithique et quelles en sont les conséquences sur nos corps. Il apparaît que la domestication des plantes et des animaux a largement diminué la diversité de notre régime alimentaire. Les humains du néolithique ont consommé moins de viande que les chasseurs-cueilleurs, occasionnant une baisse de la vitamine D. Ce serait pour cette raison que la couleur de peau des humains et des Européens est devenue blanche. En effet, face à la carence de la vitamine D, notre corps a mis en activité un gène jusque-là endormie qui permet par l’ensoleillement de sécréter de la vitamine D. La peau noire en sécrète moins. Si on reste sur la question des gènes, nous observons que l’environnement a mis en avant chez les populations nord-européens d’un gène produisant une enzyme : la lactase. Cette enzyme permet de consommer et digérer le lait plus facilement, sans trop qu’on sache pour quelles raisons toutes les populations ne sont pas concernées. Ce ne sont pas les seuls changements sur notre corps. Par la sédentarisation et l’élevage, les humains ont un corps moins fortifié, moins musclé que les chasseurs-cueilleurs et les nomades. De manière plus intrigante encore, notre nouveau régime alimentaire a modifié notre mâchoire. Avant, les dents supérieures et les dents inférieurs étaient pour les humains adultes du Paléolithique parfaitement alignés pour faciliter la mastication de la viande crue. Or, ce processus de rapprochement des mandibules ne s’est plus fait au Néolithique. Par cette différence, les populations ont adopté dans leur langage plus de mots utilisant les lettres « F » et « V ». Sur une cartographie comparant les langues des populations sédentarisées, agriculteurs et éleveurs et les populations chasseurs-cueilleurs contemporains, on remarque que ces dernières ne possèdent quasiment pas le son « F » et « V ».
L’essor des maladies liées aux animaux et de l’artisanat
Enfin, le documentaire aborde les questions environnementales et sociales. La domestication des animaux et la sédentarisation ont produit une promiscuité entre Homo sapiens et la faune. Faune qui est issue de l’élevage ou populations de rongeurs intéressées par le stockage de l’alimentation. Cette promiscuité a favorisé l’essor de zoonoses : plus d’une centaine de maladies sont apparues, et certaines d’entre elles se sont transmises aux humains. Quant aux conséquences sociales, la néolithisation des sociétés a permis de libérer du temps aux humains. Loin de la chasse, de la cueillette ou de la pêche, les humains ont eu la possibilité d’exercer des tâches qu’ils ne faisaient pas dès lors. C’est à cette période que l’on remarque une spécialisation des productions, en somme l’apparition de l’artisanat. Enfin, c’est aussi à ce moment que les offrandes dans les tombes vont se multiplier, avec des atours de plus en plus majestueux pour une catégories d’individus, sûrement les lignées les plus importantes, voire des chefs d’Etat.





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